Le rapport et la gestion des vacances quand on est entrepreneur

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L’entrepreneur (ou l’indépendant), ce spécimen qui a la bougeotte, qui vit et pense projets.

Abreuvé de conseils de productivités, de vidéos de Gary V et d’un flux constant d’activités sur les réseaux sociaux lui rappelant chaque jour qu’il doit se bouger pour arriver à ses fins.

Fins qu’il ne sait pas toujours définir et qui ne sont pas toujours les siennes.

Chaque année vient l’été (ou la période de Noel ou encore ces fameux jours fériés) et ce moment où les gens “normaux” prennent des vacances.

L’entrepreneur est confus, lui a la chance d’être “libre” toute l’année, il travaille sur des projets qu’il a choisi.

Il n’a donc pas l’impression de travailler. Dans ce cas, pourquoi prendre des vacances ?

En plus il se sent responsable vis à vis de son projet ou entreprise (qui a besoin de lui comme un enfant de sa maman), de ses associés, de ses employés, de ses clients, de sa communauté etc. Est-il vraiment libre d’ailleurs ? C’est un autre sujet.

Ce stéréotype de l’entrepreneur que je décris, je le connais très bien puisque ce fut en partie moi pendant des années.

Mon histoire avec les vacances et le repos depuis que j’entreprends

Je dois commencer par préciser que le concept de jours de congés payées m’est étranger puisque je n’ai jamais été salarié dans une entreprise et n’ai donc jamais eu la possibilité de connaitre ce moment où on “pose ses vacances”.

J’ai commencé à entreprendre sérieusement en 2014 après 7 années de pratique du poker en ligne (activité que j’assimile à celle d’un indépendant).

Comme beaucoup d’entrepreneur, je suis un passionné et quelqu’un qui ne compte pas ses heures.

Lorsque j’ai développé et dirigé Fetch de 2015 à 2018, j’ai vécu quatre étés correspondant chacun à une phase différente du développement de l’entreprise.

Mais peu importe le contexte, chaque année, je ressentais une certaine culpabilité à l’idée de prendre des vacances, de couper complètement ne serait-ce que quelques jours.

  • En 2015 Ă  cause du lancement imminent de l’activitĂ©, j’avais l’impression de “perdre” des jours prĂ©cieux sachant qu’alors l’entreprise dĂ©pendait presque entièrement de moi pour avancer (j’étais le seul des fondateurs Ă  ĂŞtre Ă  temps plein et nous n’avions pas encore d’employĂ©s)
  • En 2016 nous avions ouvert en plein Juillet notre deuxième ville (Metz) et nous commencions Ă  recruter nos premiers employĂ©s. En partant quelques jours en vacances j’avais alors eu l’impression de lâcher mes associĂ©s dans un moment important.
  • En 2017 j’avais maintenant entre 15 et 20 employĂ©s et j’avais une “peur” du jugement de ceux-ci de voir le patron se “reposer”, le sentiment d’abandonner mon Ă©quipe.
  • En 2018, c’était la pĂ©riode la plus dure, celle oĂą nous avons du cĂ©der l’entreprise. Cette annĂ©e la, je n’ai tout simplement pris aucun jour de repos durant l’étĂ© devant gĂ©rer le sauvetage de l’entreprise, sa restructuration, l’échec d’une vente, la gestion de la cession de Fetch Ă  un autre acteur et la phase de transition avec celui-ci.

Ces différentes périodes étaient synonymes de conflits avec ma copine de l’époque qui avait du mal à comprendre mes difficultés et réticences à couper entièrement lorsque je m’octroyais quelques jours de break.

Je finissais par partir en vacances (après d’âpres négociations pour en réduire la durée) mais mon esprit était plus souvent occupé par les problèmes que j’avais à gérer avec l’entreprise.

Je n’ai jamais réussi à prendre plus de 8 ou 9 jours d’affilés et encore moins à faire une vraie coupure sans aller voir mes mails, répondre à des questions sur slack voir à faire quelques tâches de ma todo list quand j’avais une heure devant moi.

Ensuite, une fois la transition effectuée et mon départ de Fetch en septembre 2018, je regrette de ne pas avoir fait une vraie coupure.

Je suis rapidement arrivé à Paris et je me suis retrouvé dans un entre-deux pendant 6 mois. Je ne travaillais pas intensivement mais je n’étais pas non plus en vacances (dont j’avais pourtant cruellement besoin).

J’ai donc mis plus du temps à recouvrer mon énergie mental et physique qui me faisait défaut après cette aventure éprouvante.

Quelques changements dans mon approche depuis 2019

Depuis bientôt deux ans, ma vision du travail et dans une certaine mesure celle des vacances et du repos ont changé.

J’ai commencé par “designer” mes journée et mes semaines idéales et je tâche depuis à les vivre au quotidien.

Je ne vais pas m’étendre en large la dessus (aujourd’hui) mais cela passe par des matinées composées de lecture, de travail concentré dans des cafés près de chez moi suivi d’une séance de sport et des après-midis qui oscillent entre rendez-vous, recherches, petites tâches, lecture et loisirs.

Hors période de vacances, je travaille quasiment tous les jours (weekend compris) mais avec une intensité variable.

Il y a des journées ou des semaines où je m’autorise à moins travailler si je ressens le besoin de réfléchir, de me donner plus de temps pour lire, écrire, faire du sport ou encore voir des amis.

Le plus important pour moi c’est d’avoir la perception d’être libre et maître de mon temps. J’aime l’idée de pouvoir aller au cinéma en fin de matinée ou dans l’après-midi si l’envie m’y prend.

Concernant les vacances j’ai encore du mal à m’autoriser à couper entièrement.

Le schéma classique pour moi dans ces périodes est de travailler quelques heures le matin et de profiter de mon temps libre les après-midis et le soir.

C’est agréable, mais avec les années qui passent, je me rends compte que ce n’est jamais un réel moment de déconnexion.

Je n’ai pas l’impression de me “recharger”, mon esprit restant activement concentré et connecté à mes problématiques professionnelles.

Ce que j’ai envie de tester cette année

Pour la première fois de ma vie d’entrepreneur, je m’autorise cette semaine à déconnecter complètement de mes engagements professionnels et de mes projets.

Pourtant, nous avons beaucoup de sujets sur le feu avec Longue Vue, mais ce sera tout autant le cas dans deux mois, l’an prochain ou dans cinq ans.

Il n y aura jamais de bons moments pour s’autoriser à couper totalement.

C’est un choix à faire : soit on en ressent le besoin et on se l’autorise, soit on continue à prendre des “demi-vacances” toute sa vie.

Cette semaine, je vais donc profiter de ce temps privilégié avec ma copine pour lâcher mon ordinateur, mes mails et Notion.

J’ai également envie de prendre du recul vis à vis de mon rapport au temps.

J’ai décidé de ne pas porter de montre et d’éviter au maximum d’avoir mon téléphone pour être dans le moment présent et de ne pas “timer” chaque activité comme je peux le faire dans ma vie pro mais aussi parfois dans ma vie personnelle (déformation professionnelle d’un ex CEO qui va un peu trop loin…).

Je m’autorise de parler de nos activités respectives avec ma copine (qui est également entrepreneuse) mais ce seront des échanges verbaux et au mieux avec un carnet (pas d’ordinateurs).

Je vous ferai le bilan de cette nouvelle approche du repos et des vacances dans la prochaine Ă©dition de la newsletter.

Ma conclusion sur ce sujet

Cette réflexion n’a pas pour objectif de juger ceux qui décident de consacrer tout leur temps au travail ou ceux qui ne déconnectent pas entièrement pendant leurs vacances.

Mon point est de montrer que cette culpabilité que nous pouvons ressentir, cette peur de trahir son entreprise, ses associés, son équipe ou ses clients est commune à beaucoup de dirigeants, entrepreneurs, indépendants et même certains salariés.

Il n y aura jamais de bons moments pour couper.

C’est à vous de vous écouter et d’assumer ce besoin ou cette envie. En réalité, personne ne vous le reprochera, du moins pas de la manière que vous imaginez.

Il y a sans doutes des périodes où cela est plus difficile voir impossible (dans mon cas l’été 2018) mais il est certain que nous surestimons l’impact soi-disant négatif sur nos entreprises ou projets que pourrait avoir quelques jours ou semaines sans notre présence.

Au contraire, pouvoir déconnecter entièrement nous fera le plus grand bien, cela sera également bénéfique pour nos projets et les personnes qui nous entourent.

Sans oublier qu’un des objectifs ultime d’un dirigeant est de se rendre non indispensable dans son entreprise à minima sur les sujets opérationnels, le “day to day”.

Pouvoir prendre plusieurs semaines – voir mois – de vacances sans que son entreprise ne soit impactĂ©e est un indicateur d’une entreprise bien structurĂ©e.

C’est terriblement important pour nous, les entrepreneurs et indépendants de ne jamais oublier que la vie et le business ne sont pas des sprints mais des marathons.

J’aimerais savoir quel est votre rapport aux vacances ? Est-ce que vous prenez des vacances cet été ? Est-ce que mon témoignage vous parle ?

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