(Partie 1/2) Qu’est-ce qu’une vie philosophique à notre époque ? L’exemple d’Henry David Thoreau

Temps de lecture : 5 minutes
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L’intérêt de la vie philosophique et ma rencontre avec Thoreau

Pour ouvrir cette série, plutôt que de partir d’une définition théorique de ce qu’est ou pourrait être la vie philosophique.

J’ai préféré vous présenter un de ses plus illustres représentants : le philosophe américain, Henry David Thoreau.

Thoreau, né en 1817 à Concord dans le Massachusetts n’est pas un philosophe comme on peut se le représenter communément.

Il n’est ni un professeur de philosophie, ni un philosophe qui écrit des livres de philosophie.

C’est un humain – comme vous et moi il me semble – essayant de vivre une vie philosophique.

Si son nom vous dit quelque chose. C’est certainement pour son expérience l’ayant amené à vivre deux ans et deux mois dans les bois, juste à côté du lac Walden à quelques kilomètres de sa ville natale, Concord.

Cette expérience donna naissance à son grand livre : Walden ou la vie dans les bois.

Ma première rencontre avec Thoreau date de mes 19 ans lors du visionnage du film Into The Wild.

Le personnage central de l’histoire du film cite plusieurs fois Thoreau qui une de ses sources ayant inspiré sa propre expérience.

À l’époque, ce film m’avait profondément marqué. Il a accompagné certains de mes questionnements pendant plusieurs mois. Comment dois-je vivre ? Qu’est-ce qu’une bonne vie ? Pourquoi devons-nous travailler ? À quoi me servira ou me desservira l’argent ?

Au cours des années suivantes, j’ai exploré les sources que citer ce fameux Christopher McCandless qui aura changé ma vie au même titre qu’un Jack Kerouac – et son Sur la route – un peu plus tôt dans mon adolescence.

Revenons à Thoreau. Il fait partie de ces individus qui par leur pensée mais surtout par la manière de conduire sa vie qui m’a questionné sur l’existence que je souhaitais avoir. Il m’a appris à ne pas suivre aveuglément les injonctions explicites ou implicites de nos sociétés modernes. M’a ouvert la porte au doute philosophique. Celui qui ne peut que changer notre regard sur le monde et sur nous-même.

Dernièrement, je me suis replongé dans la vie et l’œuvre de Thoreau. Passant plusieurs journées à lire des articles, voir des reportages et relire Walden pour m’imprégner de sa vision de la vie philosophique.

À la fin de cet essai, vous aurez grâce aux leçons que nous légua ce grand homme, une meilleure idée de ce qu’est la vie philosophique.

Ayant écrit un long essai et ne souhaitant pas vous imposer une newsletter trop longue.

Je vais maintenant vous partager 3 idées de la conception qu’avait Thoreau de la vie philosophique. Puis les 3 restantes, lundi prochain.

3 idées de la vie philosophique selon Thoreau

Pour Thoreau, un professeur de philosophie n’est pas un philosophe.

Il existe de nos jours des professeurs de philosophie, mais de philosophes, point.

Cette idée n’est pas intuitive. Avant de m’intéresser à la philosophie, je considérais que le philosophe était celui qui enseignait la philosophie. C’est faux pour Thoreau.

Dans ce cas, le vrai philosophe doit être celui qui écrit des livres de philosophie ? Mais ici encore Thoreau nous surprend.

Être un philosophe, ce n’est pas seulement avoir des pensées subtiles, ni même fonder une école, mais aimer la sagesse au point de vivre selon ses arrêts, une vie de simplicité, d’indépendance, de magnanimité et de confiance. C’est résoudre certains problèmes de la vie, non seulement théoriquement, mais pratiquement.

Deux idées doivent retenir notre attention.

La première est qu’être philosophe n’est pas un métier. En effet, nous pouvons donc être philosophes sans enseigner ni écrire de livre.

Deuxièmement, que la philosophie serait capable de résoudre des problèmes. Pas seulement de manière théorique mais pratique. Ce qui n’est certainement pas l’image que l’on se fait de la philosophie en France de nos jours.

Philosopher permet de résoudre des problèmes pratiques de nos vies quotidiennes.

Certes, la philosophie est une discipline qui baigne dans le monde des idées et des concepts. Sans pensée il n’y a pas de philosophie.

On le sait depuis l’antiquité grecque est son « miracle du logos ». Le logos est un terme important pour comprendre l’histoire de l’Occident. Il signifie à la fois discours et raison.

L’homme peut penser sa vie et le monde qui l’entoure car il est doté d’une raison. Celle-ci lui permet de comprendre les causes premières des choses, de se connaître lui-même, d’avoir conscience de sa propre existence et de son environnement. Le logos est le point de départ de la pensée et donc de la philosophie.

Je consacrerai un essai à la philosophie antique qui est fondamental pour comprendre ce qu’est la vie philosophique.

Mais nous pouvons déjà apprécier ici la rupture qui s’opéra avec Socrate dans l’histoire de la philosophie.

On considère souvent Socrate comme le « père » de la philosophie occidentale. C’est vrai et faux à la fois. Il y avait des “philosophes” avant Socrate. Mais il fut le premier à placer l’homme au centre de ses préoccupations.

La philosophie passe avec lui d’une raison physique « quelle est l’origine du monde et de l’Homme ? » à une raison existentielle « comment aider l’homme à mieux vivre ? ».

Le discours philosophique était au service d’un mode de vie que choisissait le philosophe. Un mode de vie qu’il avait créé ou qui était celui d’une école (stoïcisme, épicurisme, platonisme etc.).

Malheureusement, nous le verrons plus tard, la philosophie a délaissé sur son chemin (principal) cette vision qu’avait Socrate de la philosophie.

Heureusement pour vous et moi, certains philosophes ont repris cet héritage. Dont notre protagoniste, Thoreau.

En effet, le philosophe américain n’est pas allé vivre dans la forêt pour faire une vidéo Youtube comme nous pourrions le voir de nos jours.

C’était une réponse à une problématique personnelle. Celle de ne pas être en accord avec les valeurs et conventions de son époque.

Il ne voyait pas d’un bon œil l’arrivée de l’ère industrielle, la mécanisation de la société ainsi que les débuts de la société de consommation dont le capitalisme avait besoin pour fonctionner.

C’était un homme qui avait des problématiques concrètes. Il a dû penser, se questionner pour mieux les comprendre. Puis fort de ses réflexions, il décida de mettre en œuvre les actions nécessaires pour vivre une vie plus en accord avec ses idées.

Je suis allé dans les bois parce que je voulais vivre délibérément. Je voulais vivre intensément et sucer la moelle de la vie. Réduire à néant tout ce qui n’était pas la vie. Et ne pas, quand je viendrai à mourir, découvrir que je n’aurai pas vécu.

Le philosophe souhaite accorder ses actions avec sa pensée.

Insistons encore une fois sur ce point fondamental. Pour Thoreau, ni le professeur de philosophie, ni le producteur d’idées philosophiques ne sont philosophes.

Ils ne le sont qu’à partir du moment où ils ont le courage d’appliquer leurs idées – ou les idées auxquelles ils adhèrent – dans leur vie.

Thoreau nous fournit une quantité d’exemples.

Prenons celui de son séjour en prison. Il ne pouvait concevoir de payer des impôts dès lors que ceux-ci servaient à supporter l’esclavage ou la guerre au Mexique. Il avait développé toute une réflexion autour de la liberté individuelle et de son rapport aux lois. Vous pouvez d’ailleurs lire son petit ouvrage De la désobéissance civile pour en savoir plus.

Il considérait que tant que le gouvernement et les lois que ne mettaient pas en cause ses convictions, il n’avait aucun souci à s’y soumettre. Mais dès lors qu’elles mettaient à mal ses principes. Il se sentait obligé de rompre avec celles-ci.

Fort de ce principe et du contexte esclavagiste. Thoreau ne paya pas ses impôts pendant plusieurs années. Ce qui le conduit en prison dans sa ville de Concord. Il fut libéré après une nuit malgré lui mais il était prêt à rester en prison autant de temps que nécessaire.

Un philosophe doit vivre en accord avec ses pensées. Du moins faire de son mieux. Sinon c’est une imposture, c’est de l’intellectualisme.

Cette capacité à accorder pensées et actions nécessite d’être capable de mobiliser un esprit critique sur soi-même et sur notre société.

Penser sa vie et vivre sa pensée.

Penser la société et agir sur celle-ci.

Récapitulons :

  • Il n’est nullement nécessaire d’être professeur ou d’écrire des livres pour être philosophe.
  • Philosopher permet de résoudre des problèmes pratiques de nos vies quotidiennes.
  • Le philosophe est celui qui s’efforce d’accorder ses actions avec sa pensée.

La semaine prochaine je vous partagerai 3 autres idées permettant de comprendre ce qu’est la vie philosophique selon Thoreau.

Mes références pour écrire cet essai personnel :

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